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Photo du rédacteurRachel Durant

La blessure de rejet et le masque du fuyant

Rejeter quelqu’un c’est le repousser. Celui qui rejette reste, c’est celui qui est rejeté qui doit partir. Symboliquement, celui qui rejette exprime "je ne veux pas" (de toi). Il marque un refus.


La blessure de rejet

 

Une blessure très ancienne

Le rejet est la première des blessures ressenties. Le bébé qui arrive "par accident", celui qui n’est pas du sexe désiré, risquent fort d’expérimenter le rejet. Enfants, ils peuvent se sentir rejetés même quand leurs parents n’ont ni l’intention ni la conscience de les rejeter. Plus tard, ils interpréteront tout incident à travers le filtre de leur blessure et se sentiront rejetés là où un autre se serait senti abandonné, trahi, humilié ou victime d’une injustice.


Les régressions fœtales ont montré que dès qu’il se sent rejeté, le bébé commence à prendre le masque du fuyant. Déjà dans le ventre de sa mère, il essaye de se faire tout petit. Physiquement, il se reconnaît à son corps étroit, contracté, comme s’il voulait devenir invisible. Une partie de son corps (menton, fesses, seins ...) donne l’impression d’être petite ou absente. Il semble se replier sur lui-même, bras collés au corps.


 blessure de rejet, masque du fuyant, épanouis dans la vie, Lieusaint, 77

Rejet et comportements

Le fuyant essaye de ne pas prendre de place. Il semble douter d’avoir le droit d’exister, comme s'il n'était pas être incarné. La première réaction de quelqu’un qui se sent rejeté est de fuir. Enfant, le fuyant se réfugie dans son monde imaginaire. Il est souvent sage, ne fait pas de bruit. Il s’invente des histoires et toutes sortes de moyens de s’évader. À l’école, s’il se sent rejeté, il donnera l’impression d’être "dans la lune".


L’enfant fuyant recherche la protection à tel point qu’il déclenche des comportements surprotecteurs, étouffants. Plus tard, il oscillera entre rechercher la protection et fuir l’étouffement. Comme les autres ont tendance à faire à sa place pour le protéger, au lieu de se sentir plus aimé, il se sent rejeté (par rapport à ses capacités : "on ne me croit pas capable").


Le fuyant avance dans la vie "en touriste" ; il donne l’impression d’être là sans être là. Il ne s’attache pas aux biens matériels qui pourraient l’empêcher de fuir. Le monde des pensées l’attire plus que le monde matériel. Il considère l’argent comme nécessaire mais n’y prend pas plaisir.


Sa difficulté à être incarné peut lui donner des difficultés au niveau de sa vie sexuelle. Il tend à opposer spiritualité et sexualité. La femme peut croire devoir choisir entre être femme et être mère. Elle s’attire des partenaires qui la rejettent ou se coupe elle-même de sa sexualité.


La blessure de rejet est vécue avec le parent de même sexe

Le parent du même sexe a pour rôle de nous apprendre à nous aimer et à donner de l’amour. Le parent du sexe opposé nous apprend à nous laisser aimer et à recevoir de l’amour. C’est le parent du même sexe qui a contribué le premier à nous faire vivre le rejet, qui a réveillé en nous pour la première fois cette blessure.


Le fuyant a tendance à rejeter à son tour le parent qui l’a rejeté. Il peut développer de la rancune voire de la haine envers ce parent car il considère que c’est à lui de faire en sorte de l’accepter.


Paradoxalement, parce qu’il se sent rejeté par ce parent et qu’il se sent nul, il peut décider de tout faire pour retrouver de la valeur aux yeux de son père ou de sa mère, pour être aimé. Il peut aussi avoir cette attitude avec les personnes du même sexe que lui.


Avec le parent du sexe opposé, le fuyant a l’attitude inverse. Il craint de le rejeter et en fait des tonnes pour lui éviter de vivre ce sentiment. Si malgré tout ce parent exprime qu’il se sent rejeté, le fuyant s’accusera d’en être la cause et culpabilisera.


L’enfant fuyant peut aussi décider que son parent du même sexe n’existe plus pour lui. Il choisit de se couper de ce parent et souvent ce parent lui fera savoir qu’il peut s’en aller, l’encouragera à fuir.


La peur d’exister, de prendre sa place, de demander

Comme il se sent nul et sans valeur, le fuyant utilise souvent les mots "nul", "nullité" et "rien". Il emploie aussi le mot "disparaître" : "j’aurais voulu disparaître à cet instant". Comme il se refuse le droit d’exister, il utilise également le mot "inexistant".


Comme il a tendance à se trouver de trop, à s’effacer, le fuyant recherche la solitude. Paradoxalement, tout en recherchant la protection, il fuit l’attention car s’il en recevait, il ne saurait qu’en faire : comment concilier le sentiment d’être nul et accepter de recevoir de l’attention ?


S’il est le centre de l’attention, le fuyant perd ses moyens. Il craint aussi de prendre trop de place, de déranger : s’il dérange, il sera rejeté.


Bien qu’il sache ce qu’il veut, le fuyant a peur de demander. Si la personne est occupée, il n’insiste pas : s’imposer serait prendre trop de place, se donner trop d’importance !


Rejet et vie sociale

Le fuyant a généralement peu d’amis. À l’école, il est assez solitaire car il donne l’impression de vouloir rester seul et les autres l’approchent difficilement. Adulte, le même phénomène se produit.


Plus il se sent seul, plus il s’isole. Il finit par devenir effacé, transparent, aux yeux des autres. Il se sent coupé d’eux. Plus il s’isole, plus il se sent rejeté. Il arrive que, dans des groupes, on prenne soudain conscience de la présence d’une personne qu’on n’avait pas "vue" auparavant. On se demande : "est-ce qu’elle était vraiment là depuis le début ?". Le fuyant arrive à se faire oublier, à disparaître.


Cela se produit d’autant plus que la personne qui souffre de rejet a tellement le sentiment de ne pas avoir de valeur, de n’être rien, qu’elle pense n’avoir rien d’intéressant à dire et préfère se taire, mais il peut aussi arriver que, par besoin d’être reconnu, le fuyant se mette à parler beaucoup. Il le fait alors de telle manière que les autres ont tendance à le juger vaniteux. Quand on lui coupe la parole, le fuyant préfère laisser tomber parce qu’il pense que cela lui arrive parce qu’il n’est pas intéressant ou qu’il a pris trop de place.


Le masque du fuyant

 

Son apparence physique

Le corps

  • Asymétrie marquée du corps et du visage.

  • Corps étroit, contracté, mince, souvent plus petit que la moyenne.

  • Poignets et chevilles minces. Donne l’impression qu’une partie du corps veut disparaître, qu’il "manque un morceau" (menton absent, poitrine creuse, petits seins, petites chevilles, etc.).

  • Impression de blocage de croissance d’une partie du corps : "Un adulte dans un corps d’enfant".

  • Même en se tenant droit, il donne l’impression de se replier sur lui-même, de ne pas vouloir prendre de place.

  • Peau collée aux os mais avec un système musculaire solide.


Le visage, les yeux, le regard

  • Visage petit.

  • Yeux petits, souvent cernés, fuyants, "ailleurs", apeurés.

  • Les yeux peuvent sembler vides car la personne part facilement "en astral".


Attitudes corporelles

  • Épaules rentrées vers l’avant.

  • Bras collés au corps. Donne l’impression de ne pas vouloir prendre de place, de vouloir se faire petit.

  • Enfant sage, se faisant facilement "oublier".


La manière de s’asseoir

  • Jambes et pieds sous les cuisses. Sa préférence serait de s’asseoir par terre : en n’ayant pas les pieds branchés au sol, il peut s’évader plus facilement.


La voix

  • Parle peu, de manière évasive.

  • Voix éteinte, faible.


Le vocabulaire

  • Utilise fréquemment les mots : Nul, rien, disparaître, transparent, inexistant, effacé, cocon, panique.


Ses ambivalences

  • Tout en faisant tout pour recevoir de l’attention, il recherche la solitude car il ne saurait que faire de cette attention.

  • En veut (jusqu’à haïr) à son parent du même sexe parce qu’il se sent rejeté par lui, mais peut faire tout pour être accepté, être aimé par lui. Il croit qu’il ne sera pas un individu complet tant qu’il n’aura pas conquis l’amour de ce parent.

  • Plus il se rejette lui-même, plus il a peur de se faire rejeter.

  • Se croyant nul et sans valeur, il se dévalorise sans cesse, il essaye en même temps par tous les moyens de se valoriser aux yeux des autres et aux siens.

  • Bien qu’il sache ce qu’il veut, il a du mal à demander.

  • Tout en recherchant la protection, il a peur d’être étouffé.

  • Ou il parle peu pour se faire oublier ou il parle beaucoup pour se valoriser.


Ses confusions

  • Être compris et être aimé : veut à tout prix être compris, notamment de sa mère, et croit qu’ainsi il sera aimé.

  • Être et faire : recherche la perfection pour être reconnu, accepté, mais confond ce qu’il fait avec ce qu’il est. Cherche tellement à faire parfaitement qu’il fait les choses lentement et s’attire ainsi des jugements (= rejet) par les autres.


Son rapport

Aux autres

  • Présence en "touriste" : Le fuyant donne l’impression d’être là sans réellement y être.

  • Surprotection maternelle : La réaction de la mère face à sa fragilité, elle le surprotège, ce qui lui fait craindre d’être "étouffé" par les autres.

  • Doutes sur l'amour : Il a du mal à croire qu’on puisse l’apprécier ou l’aimer.

  • Peu d'amis : À l’école et au travail, il est généralement perçu comme solitaire et on le laisse seul. En groupe, il s’efface et devient "invisible".

  • Réservé dans ses demandes : Il n’ose pas demander et préfère laisser tomber.

  • Subir sans riposter : Il se croit obligé de subir les situations désagréables comme s’il n’avait pas le droit de riposter. Il parle généralement peu.


À la nourriture

  • Petites portions : Préfère de petites portions et a l’appétit coupé par les émotions.

  • Anorexie : C’est le type le plus prédisposé à l’anorexie.

  • Évasion par les substances : Pour fuir la souffrance, il peut se tourner vers l’alcool ou les drogues.

  • Sucre et peur : Il est porté sur les aliments sucrés lorsqu’il a très peur.


Au poids (= la place prise ou qu’il croit devoir prendre)

  • Invisibilité : Ne voulant pas prendre de place, il ne veut pas prendre de poids. Comme il a souvent envie de "disparaître", être maigre l’aide à être "invisible".


Au temps

  • Lenteur : Son souci de perfection le rend particulièrement lent dans l’exécution des tâches, et il prend beaucoup de temps pour faire les choses.


Sa plus grande peur : La panique

  • Réaction de fuite : Il craint tellement de paniquer que sa première réaction est de fuir.

  • Anticipation de la panique : Convaincu de ne pas pouvoir gérer les situations, il panique à l’avance, surtout dans les situations où il risque d’être le centre de l’attention.

  • Trous de mémoire : Cette peur peut entraîner des trous de mémoire.


Ce qu’il a à apprendre

  • Présence : Accepter d’être présent, ici et maintenant (redescendre sur terre).

  • Intégration : S’intégrer et aller vers les autres.

  • Acceptation du contact : Accepter d’être touché.

  • Valorisation personnelle : Cesser de se raconter et de raconter qu’il ne vaut rien, qu’il est nul.

  • Reconnaissance des émotions : Se reconnaître le droit d’en vouloir à son parent du même sexe de l’avoir rejeté.

  • Authenticité : Cesser de vouloir tout faire pour être aimé.

  • Droit d'exister : Se reconnaître le droit d’exister.


Mots clés

  • Place : Semble ne pas s’être complètement incarné, doute de son droit à exister, voudrait "disparaître", ne prend pas sa place.

  • Petit : Qu’il soit ou non petit de taille, se vit comme une "petite chose".

  • Cocon : Se retire dans son cocon pour ne plus souffrir.

  • Nul : A l’impression de ne pas être intéressant, de n’avoir rien d’intéressant à dire.

  • Déranger : Il craint de déranger par peur d’être rejeté.

  • Coupé : Il se sent souvent coupé des autres et ne se rend pas compte que c’est son habitude de fuir, de ne pas être là, qui cause cette coupure.

  • Demander : Il a peur de demander. C’est prendre trop d’importance et risquer d’être rejeté.

  • Matériel : Il a des difficultés avec tout ce qui est matériel, ce qui pourrait le rattacher à la terre.

Somatisations (tendances)

Problèmes de peau, arythmie, vomissements, diarrhée, problèmes respiratoires, allergies, diabète, coma, étourdissements, évanouissements, hypoglycémie, dépression suicidaire, psychose, cancer.


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